A Gap, un miroir d'eau a pris place sur l’esplanade Desmichels pour permettre aux habitants de se protéger de l'impact des îlots de chaleur urbains. Photo : Ville de Gap
A Gap, un miroir d'eau a pris place sur l’esplanade Desmichels pour permettre aux habitants de se protéger de l'impact des îlots de chaleur urbains. Photo : Ville de Gap

Ilots de chaleur urbains : des solutions inspirantes déployées en région Sud

Chaleur et pollution. Face à l’intensification des îlots de chaleur urbains (ICU), ces zones citadines où la température est nettement supérieure à celle des campagnes avoisinantes, les villes de la région Sud multiplient les solutions pour rafraîchir l’espace public. Végétalisation des rues, désimperméabilisation des sols, création d’îlots de fraîcheur, sont autant d’initiatives déployées pour le mieux-être de la population, qualité de l’air incluse. En luttant contre la chaleur, ces actions contribuent à réduire la pollution atmosphérique, offrant un double bénéfice environnemental et sanitaire. Tour d’horizon de ces initiatives inspirantes qui réinventent les grandes villes sudistes à l’heure du dérèglement climatique.

Marseille : « Cool Noons » à la rescousse des touristes et des habitants

Depuis 2024, et en partenariat avec l’Office de Tourisme, la Ville de Marseille déploie deux « Parcours fraîcheur » dans le cadre du projet européen « Cool Noons ». Une initiative qui vise à « améliorer le tourisme durable », quand les villes du pourtour méditerranéen sont amenées à repenser leur offre touristique face à la chaleur. Identifiés et cartographiés dans le centre historique marseillais et le 7ème arrondissement, ces parcours proposent des espaces végétalisés et des zones ombragées. Des pergolas ont ainsi été installées autour du Mucem, de la Corniche, du Vallon des Auffes ou encore au Cours Julien. Les visiteurs peuvent également faire le plein d’eau auprès du réseau de commerçants inscrits dans le dispositif « gourdes-friendly ». Le Plan Arbres déployé par la Ville depuis 2020 contribue par ailleurs à lutter contre les îlots de chaleur urbains en offrant des zones ombragées (100 000 arbres, arbrisseaux et plants forestiers plantés sur un total de 308 000 promis d’ici 2029).

Quel impact sur l’air ?

La mise en place de parcours fraîcheur peut encourager les modes de déplacements doux qui participent à réduire les émissions polluantes liées au transport routier. Les arbres et végétaux contribuent par ailleurs à produire de l’oxygène et à absorber les différents polluants atmosphériques. En fonction des essences d’arbres choisies et des composés organiques volatiles qu’elles émettent, ils limitent la formation d’ozone (polluant secondaire qui se forme majoritairement l’été en raison de la chaleur et du rayonnement solaire). Les arbres agissent ainsi comme des filtres naturels qui améliorent la qualité de l’air.

A Marseille, pour lutter contre les îlots de chaleur urbain et rafraîchir la population, des pergolas ont été installées dans différents endroits dans le cadre du projet européen "Cool Noons". Photo : Office de tourisme de Marseille.
A Marseille, pour lutter contre les îlots de chaleur urbains et rafraîchir la population, des pergolas ont été installées dans différents endroits de la cité dans le cadre du projet européen « Cool Noons ». Photo : Office de tourisme de Marseille.

Nice : des géodonnées spatialisées pour localiser les ICU

Développer des solutions pour faire face aux îlots de chaleur urbains fait partie des engagements du Plan Climat 2019-2025 de la Métropole niçoise. Depuis juin 2021, et en collaboration avec un cabinet en ingénierie, elle déploie une cartographie interactive des ICU du territoire grâce à un outil de géodonnées et de cartogérance spatialisé. Déployée pour deux ans, la méthode permet d’anticiper les épisodes de canicule en appréhendant le ressenti d’une vague de chaleur par les habitants et les usagers. L’innovation se base également sur les aspects liés au bâti, à la topographie et aux spécificités météorologiques locales associées. De son côté, la Ville de Nice participe au projet « portraits climatiques » de l’Ademe, qui fédère les laboratoires de recherches et d’urbanisme pour replacer les ICU au cœur de la conception urbaine. D’ici 2026, la municipalité prévoit la création de 70 hectares de zones rafraîchies, dont 28 hectares de sols perméables.

Quel impact sur l’air ?

L’identification précise des îlots de chaleur constitue un outil précieux pour le confort thermique des habitants et la qualité d’air qu’ils respirent. Cette méthodologie d’identification s’impose comme un outil d’aide à la décision des politiques publiques dans l’aménagement urbain. En s’appuyant sur une planification qui inclut des facteurs bioclimatiques (espacement et orientation des bâtiments, isolation, ombrage…), la circulation de l’air peut être améliorée et permettre une meilleure dispersion des polluants.

A Nice, les géodonnées et la cartogérance permettent de localiser les îlots de chaleur urbains. Photo : Cerema
A Nice, les géodonnées et la cartogérance permettent de localiser les îlots de chaleur urbains. Photo : Ville de Nice

Toulon : des « balades sensibles » pour lutter contre les ICU 

En s’appuyant sur l’expertise du CEREMA, la Ville de Toulon fait le pari de la participation citoyenne et de la co-construction des solutions d’adaptation pour endiguer le phénomène des ICU. Dans cette veine, des « balades sensibles », qui s’inscrivent dans le cadre du dispositif « Plus fraîche ma Ville » de l’Ademe, ont été organisées entre 2022 et 2024 à destination de la population. L’idée :  impliquer les participants dans le diagnostic de surchauffe de la ville en se basant sur leur ressenti thermique pour identifier les ICU. Comme lorsqu’ils passent à proximité de systèmes de climatisation, qui augmentent la température extérieure dans des villes déjà en surchauffe, générant par ailleurs des gaz à effet de serre. L’objectif final : intégrer le phénomène d’îlot de chaleur urbains dans les futurs plans d’aménagements de la ville.

Quel impact sur l’air ?

Les données récoltées dans le cadre de ces « balades sensibles » permettent d’agir à son échelle en faveur d’une qualité d’air moins suffocante en ville l’été. Plus globalement, ces balades climatiques incitent les habitants à prendre conscience de l’impact de la pollution sur la santé lors de fortes chaleurs. La population est ainsi sensibilisée aux enjeux de l’air, souvent occultés dans les grands défis climatiques.  

A Toulon, les « balades sensibles » se basent sur le ressenti thermique des participants pour localiser les îlots de chaleur urbains. Photo : Canva

Avignon :  la double lutte  îlots de chaleur urbains – « street pooling »

En 2020, la Communauté d’Agglomération du Grand Avignon inaugurait ses deux premiers îlots de fraîcheur au square Agricole Perdiguier et au parc Colette. Equipés de brumisateurs, ces kiosques offrent depuis une halte rafraîchissante aux habitants et touristes qui vise aussi à préserver la ressource en eau. La lutte avignonnaise contre les ICU s’accompagne en effet d’une lutte contre le « street pooling ». Une pratique qui consiste à ouvrir les bornes incendie pour créer des geysers urbains. A travers ces kiosques rafraîchissants encadrés, l’agglomération avignonnaise entend offrir une alternative sécurisée et durable. En parallèle, la municipalité propose une carte interactive qui recense les îlots de fraicheur (parcs, fontaines, jeux d’eau). Pour identifier les ICU, elle a commandité les étudiants de Licence III de Géographie – Aménagement de l’Université d’Avignon de mener une étude et de proposer des solutions urbanistiques adaptées.

Quel impact sur l’air ?

Les îlots de fraicheur constituent de réels régulateurs thermiques : fontaines, brumisateurs, bassins ou rivières urbaines créent des zones de fraîcheur par évaporation, ce qui abaisse la température ambiante. De quoi réduire la formation d’ozone troposphérique, cette pollution de l’air spécifique aux périodes des grandes chaleurs et de canicules.

Des kiosques rafraîchissants ont été installés dans le square Agricole Perdiguier et au parc Colette pour offrir des spots de fraîcheur aux passants. Photo : Ville d’Avignon

Gap : un miroir d’eau rafraîchissant anti-ICU

À l’été 2024, la Ville de Gap inaugurait un miroir d’eau sur l’esplanade Desmichels. Cette surface pavée équipée de brumisateurs est accessible à tous et s’entoure de coins de verdure. Autre initiative : les gradins de la patinoire sont ouverts au public en période de fortes chaleurs pour permettre aux habitants de bénéficier gratuitement d’un espace tempéré. En parallèle, la municipalité se dote d’un plan «Arbres en ville » pour végétaliser son tissu urbain : près de 150 arbres ont ainsi été plantés dans les cours d’école entre 2019 et 2020. L’équipe municipale poursuit par ailleurs un objectif de 2 000 arbres introduits dans la commune alpine. Depuis 2023, la Ville a aussi engagé des travaux de désimperméabilisation de la voirie et la création de nouveaux espaces verts. 3 500 m² d’espaces bitumés ont ainsi été renaturés. Une seconde phase de ce programme prévoit l’aménagement de 15 à 20 zones supplémentaires à l’horizon 2026.

Quel impact sur l’air ?

La désimperméabilisation des sols participe à l’amélioration de la qualité de l’air. Contrairement aux sols végétalisés, les surfaces imperméables emmagasinent la chaleur et la restituent. En remplaçant ces surfaces par des sols perméables et végétalisés, la température ambiante et la formation d’ozone troposphérique diminuent. Outre le fait de capter les polluants atmosphériques, la végétation améliore l’humidité dans l’air par l’évapotranspiration, ce qui favorise un meilleur confort respiratoire.

Le miroir d'eau installé sur l’esplanade Desmichels est très prisé par la population lors des épisodes de fortes chaleurs. Photo : Ville de Gap.
Le miroir d’eau installé sur l’esplanade Desmichels est très prisé par la population lors des épisodes de fortes chaleurs. Photo : Ville de Gap.

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